Comprendre les vagues de chaleur au Cameroun en ce moment
1- Qu'est-ce qui explique les vagues de chaleur qui touchent le pays en ce moment ?
Depuis au moins le mois de novembre 2023, le Cameroun à travers ses cinq zones agroécologiques est sous l’emprise de la saison sèche, en raison du positionnement de la ligne de Front Inter Tropical au Sud du pays. Ladite saison s’accompagne très souvent de situations de journées très chaudes et de nuits froides dans le grand nord du pays, des situations de journées et de nuits chaudes dans le grand Sud du pays.
Effectivement, force est de constater que par rapport aux dernières années, cette saison est particulière en raison du caractère plus marqué des vagues de chaleurs vécues depuis de nombreuses semaines dans le grand Sud. Cela est lié à l’influence d’un phénomène climatique particulier techniquement appelé El-niño, courant marin qui se traduit par le réchauffement des eaux de surface au niveau du pacifique équatorial, avec une périodicité de 3 à 7 ans, et des répercussions sur le climat au niveau du golfe de guinée, dont fait partie le Cameroun.
Par ailleurs, des études réalisées par l’ONACC sur ce phénomène pour la période allant de 1950 à 2020 ont révélé que les années à épisode El niño se caractérisent généralement par une augmentation des températures au niveau du Cameroun. Voilà ce qui justifie les températures anormalement élevées tant durant la journée que durant la nuit que nous vivons sur l’ensemble du territoire national en ce moment.
2- Ces températures sont-elles normales quand on fait l'historique à cette même période les années antérieures ?
Dans notre Bulletin de prévision saisonnière des paramètres climatiques des mois de décembre 2023, janvier et février 2024, nous annoncions déjà que ladite période sera assez chaude, en raison du développement du phénomène El niño précédemment évoqué (pages 5 et 6 dudit bulletin). Ces mêmes informations ont par la suite souvent été reprécisées dans les bulletins de prévisions et d’alertes climatiques décadaires (qui sont publiés tous les 10 jours). Après comparaison de la situation observée depuis lors, par rapport à celles observées durant les 40 dernières années, il a été fait le constat selon lequel les vagues de chaleur de cette période (janvier-février 2024) ont atteint des niveaux records jamais observés sur la période historique cible (au moins depuis 1980).
D’ailleurs, cela a été d’avantage confirmé par l’Organisation Météorologique Mondiale (OMM), qui a identifié le mois de janvier 2024 comme l’un des plus chauds de ces 50 dernières années dans la zone inter tropicale et la zone du golfe de guinée en particulier, ajoutant que cela pourrait se poursuivre durant les semaines ou les mois à venir.
3- Quels impacts sur la santé et l’agriculture ?
Ces vagues de chaleurs et fortes températures observées dans les zones cibles impactent significativement la santé. Tout d’abord, lesdites vagues de chaleur sont préjudiciables aux personnes âgées, aux femmes enceintes, aux personnes présentant des comorbidités (diabétiques, hypertendues etc.), en raison des situations d’inconfort thermique que cela entraine, surtout dans la nuit.
D’ailleurs, si vous faites un sondage auprès des populations du grand sud sur la qualité des nuits depuis le mois de janvier, ils vous diraient qu’elles sont de moins en moins confortables à cause de la chaleur. C’est l’exacte manifestation de ce que nous décrivons et que nous avons annoncé dans nos bulletins. Aussi, lesdites chaleurs entrainent très rapidement des cas de déshydratation chez tous les sujets.
Concernant la santé animale, les fortes températures observées constituent un facteur de développement des épizooties à germes préférant les conditions chaudes. De même, la rareté des ressources en eau qu’entraine cette situation dans la zone Soudano-sahélienne (régions de l’Extrême-Nord, du Nord et de l’Adamaoua) pourrait affecter les conditions d’abreuvement des animaux, surtout le gros bétail dans ladite zone agroécologique et entrainer de mauvais rendements.
Sur le plan de l’agriculture, il faut dire que les températures élevées et les fortes chaleurs qui en résultent exposent de plus en plus les plantations (cacaoyères, caféières, palmeraies, etc.) à une dégradation et une destruction par les feux de brousse, en raison du très faible niveau d’humidité de la végétation.
4- Quels conseils pour les populations ?
Tel que mentionné dans nos bulletins de prévisions, nous recommandons aux populations (selon les moyens disponibles) de prendre les dispositions pour aérer et ventiler les maisons d’habitation, de s’hydrater (boire beaucoup d’eau) à des intervalles de temps réguliers.
Face au risque de destruction des plantations par les feux de brousse, nous recommandons vigilance, afin d’éviter autant que possible la propagation incontrôlée des feux.
Téléchargez : Bulletins décadaires ICI et Bulletins saisonniers ICI